Qu’il réalise un film ou un documentaire, écrive un livre, soit l’auteur/chanteur de Trust ou en solo il « a une étanchéité de bouchon ».
Gorgé de country pour celui qui considère Ferrat, Ferré comme des pères « Odi et amo » est un pur album de chansons aux ambiances blues, rock la plupart étant faîtes avec des machines à la place de batteries pour que ce soient des chansons de 2023.
Bien sûr, il vient de plus loin, de toutes parts : nourri au lait de Fauré et de Satie, il a embrassé sans s’y perdre les imprécations post-punk de The Fall comme le dandysme stonien de Nikki Sudden.
Peu importe son moyen d’expression, l’écriture et l’intégrité sont ses marques de fabrique. Écrire pour raconter, écrire pour dénoncer, écrire pour être en harmonie avec ce qu’il pense et défend. Dans « Amo Et Odi » il combat le cynisme ambiant, le manque d’empathie et aspire à la solidarité comme il l’a toujours fait. Le mot colère ne lui fait pas peur, mais il la veut constructive afin de rester vigilant et inlassablement continuer à s’intéresser aux autres. Tous les autres, qu’ils soient au coin de la rue ou à l’autre bout du monde comme en Syrie, pays qui a changé sa vie. Une colère qui ne connaît pas la fatigue même si la route est longue. Une colère faîte pour - comme lui l’a fait - nous faire lever le c… de notre canapé.
« En écriture j’ai deux passions, Céline et les auteurs romains » d’où le « Odi Et Amo » qui est un vers du poète Catulle qui se traduit par “J’aime et je hais”, résumé idéal de cet album. « Avec un solo, c’est logique, tu donnes plus de toi », outre ses convictions on y trouve avec pudeur son enfance « Si c’était à refaire », ainsi que l’amour que se portait ses parents disparus sur « A s’en ouvrir les veines », première fois qu’il chante sur un piano/voix. Neuf mois après le dernier Trust, « Odi Et Amo » est un album de colère positive donc, mais aussi et surtout un album d’amitié. Imaginé à quatre avec Izio Diop, David Jacob tous les deux membres de Trust « parce que ce sont les meilleurs » et l’ami de cinquante ans Jean-Pierre Bucolo « Qui joue du dobro comme personne ». Ils se sont d’abord enfermés dans un studio à Suresnes, véritable laboratoire de leurs envies où la spontanéité était le maître mot et les imprévus les bienvenus.
Comme ce piano/voix proposé par Jacob qui mit les larmes aux yeux à tous et que Bernie Bonvoisin à peine rentré chez lui a habillé de ses mots émouvants sur les 62 ans de vie amoureuse de ses parents. Puis la bande est parti enregistrer aux studio ICP à Bruxelles et là encore la liberté était au rendez-vous, comme sur l’intro du prémonitoire « Allons zenfants » qui sonne comme une boite à musique résultat d’une impro sur un Rhodes non branché. Ou encore toute la composition de « Amy » (Whinehouse) au moment où l’album semblait fini… A ce stade on comprend mieux que 32 (!!) chansons soient nées de ces sessions.
© 2022 Pyrprod X Création Clémentine Mouret